Faut-il boycotter les Etats-Unis pendant le mandat de Trump?

Voyage, politique et éthique: boycotter les Etat-Unis à cause de Trump?

Voyage et politique sont intrinsèquement liés et les dernières semaines sont là pour nous le rappeler. Au vu des dernières semaines et de ce qu’il s’est passé depuis l’investiture de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis, cette question est ressortie dans pas mal de discussions. Je me la suis moi-même posée, n’ayant pas envie de soutenir une telle haine et ayant été révoltée par les récents événements. Passé le premier choc, ma colère et mon envie de vomir et donc par conséquent, mon envie de boycotter les Etats-Unis, je suis très vite revenue sur ma position. Depuis quelques temps, j’ai très envie de retourner aux Etats-Unis, de visiter de nouveaux endroits, mais aussi de retourner à New York. Je ne dis pas que cela va se faire dans les mois à venir, mais l’on ne sait jamais. Je ne veux pas boycotter les Etats-Unis et au contraire, si mes voyages m’y mènent, je prendrais cette opportunité pour parler de politique avec les Américains que je rencontre et tenter de comprendre, comme je le fais dans le monde entier.

Je me souviens de discussions très enflammées lors de mon voyage d’un mois et demi aux Etats-Unis. J’ai parlé politique, Obamacare, communisme, armes à feu, peine de mort et j’en passe avec des gens rencontrés dans le bus, en Couchsurfing, avec de nouveaux amis et avec des gens très différents. Je me suis rendue compte que nos perceptions du monde étaient globalement très différentes et ces débats étaient très intéressants, même si pas toujours faciles. Avec ce type de discussions, nous apprenons mutuellement, tout du moins lorsque la conversation n’est pas coupée brusquement par mon interlocuteur qui ne souhaite pas aller plus loin, pour différentes raisons. Cela m’est arrivé de nombreuses fois et pas seulement aux Etats-Unis. J’ai toujours été assez fascinée par ce pays que j’ai du mal à comprendre pour de nombreuses raisons et je m’étonne souvent sur le fait que de nombreux américains sont dans une véritable bulle et voient le monde comme dangereux et ne souhaitent donc pas voyager à cause de cela. C’est un comportement que je comprends mieux chez les Japonais, maintenant que je vis au Japon, leur pays étant si sûr, que mettre les pieds dehors pourrait sembler être un gros risque pour eux. Mais pour un Américain??? C’est l’un des pays où je me suis sentie le moins en sécurité la nuit et ce, dans plusieurs villes et l’on ne peut pas dire que le pays soit le modèle de la sûreté… Bref, j’aime parler avec ces gens, j’aime essayer de leur montrer que le monde n’est pas si dangereux, en paroles et en actes. Il en va de même en France d’ailleurs, quand je parle de destinations plus controversées comme la Colombie par exemple. Peut-être que si je dis à quelqu’un de pas du tout convaincu, que la Colombie n’est pas un pays dangereux ou que voyager seule n’est pas un acte risqué, cette personne ne me croira pas et me prendra pour une folle. Mais si je suis la quatrième personne à lui parler de la Colombie comme un pays extraordinaire, si je suis la dixième personne qu’elle croise voyageant seule, ne vais-je pas, d’une certaine manière, œuvrer à un changement d’opinion et à une plus grande ouverture au monde?

Voyage, politique et éthique: boycotter les Etat-Unis à cause de Trump?

Alors oui, je vais aller aux Etats-Unis. Oui, je vais continuer à voyager dans des pays du monde controversés. Oui, je vais voyager dans des dictatures ou des pays où certaines pratiques sont condamnables pour les droits de l’homme ou les droits de la femme. Dans la limite de ma conscience et de ce que je suis capable d’encaisser (pour les Maldives et la Corée du Nord, je ne sais pas encore). Je me souviens m’être faite attaquée par des lecteurs (et des trolls sans aucun doute) quand je suis allée en Chine. Je trouve ça tellement hypocrite et tellement arrogant. En quoi puis-je juger? Parce que je suis Française et vient du Pays des Droits de l’Homme, soit disant un pays meilleur? Ils ont sans doute oublié de regarder ce qu’il se passent chez nous. Où met-on la limite alors? Je ne suis pas d’accord avec la politique des Etats-Unis depuis des années, mais cela ne m’a pas empêché d’y voyager. Ils ont la peine de mort là-bas… Je crois que c’est à chaque voyageur de définir les limites qu’il peut s’offrir, de voyager en conscience de cause, de s’informer et de faire en sorte de ne pas avoir un impact négatif.

Voyage, politique et éthique: boycotter les Etat-Unis à cause de Trump?

Je crois d’ailleurs que le voyage a un pouvoir bien plus puissant qu’on ne veut bien lui donner. Je me souviens de cette jeune Chinoise, qui avait fait des études supérieures et voyageait en Asie du Sud-Est pendant un mois. Nous nous sommes croisées dans un bus au Laos et j’ai tâté le terrain pour parler de la Chine. Elle a été très ouverte et m’a avoué qu’elle avait appris la semaine précédente, par une voyageuse Néerlandaise ce qui s’était passé et se passait au Tibet. Elle avait honte de ne pas le savoir, de croire que ce qu’on lui avait raconté depuis l’enfance était vrai. Je repense aussi à ces nombreux Birmans, qui venaient me parler de politique directement, à mot couverts. Mais surtout, qui me posaient des questions sur le monde extérieur, sur ce que l’on savait de la Birmanie en France. Boycotter ces pays, c’est interdire à la population un accès et une ouverture, aussi minimes soient-ils, au monde et à ses multiples possibilités. Comment pourrais-je faire cela?

Voyage, politique et éthique: boycotter les Etat-Unis à cause de Trump?

Cela peut sembler complètement utopiste, mais je crois vraiment que le voyage est un acte politique et peut changer des choses. Bien sûr, je ne crois pas et je n’ai pas l’arrogance de prétendre que je vais changer le monde à chaque kilomètre parcouru, à coup de sac à dos, de volontourisme et de bons sentiments. Mais je crois que (selon comment c’est fait et en voyageant de manière responsable, en se renseignant sur le pays et en voyageant en connaissance de cause) en voyageant, on apporte une petite pierre à l’édifice de la paix et à l’ouverture et l’échange entre les peuples. Et les deux histoires racontées ci-dessus en sont deux petits exemples sur seulement deux pays. Imaginez cela à l’échelle de tous les voyageurs et de tous les voyages vécus…

Voyage et politique, blogging et éthique

Récemment, s’est posée la question si les blogueurs de voyage pouvaient et devaient parler de politique. Certains diront farouchement que non, que l’on est là pour vendre du rêve et montrer les belles choses de ce monde. Ce n’est pas la manière dont je conçois le blogging, ni même le voyage. Je veux montrer la réalité du monde et du voyage, vous convaincre que le monde n’est pas si dangereux qu’on nous le fait croire, que l’humanité est belle et que voyager seul n’est pas dangereux, impossible ou compliqué. J’ai toujours écrit avec sincérité et authenticité, le bon comme le mauvais. Récemment, j’ai parlé brièvement des attentats en Europe, j’ai parlé du Brexit et me voilà aujourd’hui à écrire ces lignes. Cela ne sera sans doute pas les dernières lignes politiques de ce blog, même si, ne vous inquiétez pas le voyage et les beaux paysages auront toujours leur place par ici. Je pense que c’est mon devoir de blogueuse de parler de ces sujets et de ne pas les ignorer, c’est ma responsabilité. Je ne veux pas vous faire croire que nous sommes dans un monde de bisounours et qu’il n’y a pas de problèmes ici ou ailleurs ou que les changements qui se passent actuellement dans le monde ne sont pas révoltants. En voyage, on est parfois témoins de situations terribles, on est spectateur de changements politiques, de misère, de droits bafoués et j’en passe. Alors, c’est mon devoir de blogueuse, de voyageuse et d’humain, tout simplement que de ne pas fermer les yeux et d’en parler.

En apprendre plus sur la responsabilité et l’éthique du blogueur dans cet article.

Voyage, politique et éthique: boycotter les Etat-Unis à cause de Trump?

Voyager est un acte politique

Le voyage est intrinsèquement lié à la politique et l’on ne peut l’en dissocier ou l’ignorer. Lorsque je voyage dans un nouveau pays, l’économie, les visas, la situation sécuritaire, les événements politiques affectent mon voyage et en font partie intrinsèque. Lorsque je fais le choix de voyager, c’est également politique. Lorsque je voyage seule autour du monde, c’est féministe.

J’ai grandi dans une famille très politisée. Dès le plus jeune âge, j’étais plongée dedans et les débats à table ont toujours été enflammés. L’histoire raconte que je chantais l’Internationale à trois ans, mais je n’en ai aucun souvenir. J’ai beaucoup appris en discutant avec ma famille et j’apprends toujours en débattant avec eux lorsque j’en ai l’occasion. J’ai grandi dans un pays fortement politisé (je peux vous l’assurer, en comparaison à d’autres pays où j’ai vécu!) et il paraît que les Français ne parlent que de trois sujets à table: de nourriture, de politique et de sexe… et l’on n’est pas loin de la vérité! A 16 ans, je participais à ma première manif, à 17 ans, j’entrais à Sciences Po, à 18 ans, je bloquais mon université et je défilais dans la rue. Même si je n’étais pas été aussi engagée dans les années suivantes, la politique faisait partie de ma vie. Et puis, j’ai vite été désillusionnée par tout cela, j’ai vite une vision très négative et me suis dit que cela ne servait à rien, que je n’arriverais à rien changer. Je suis partie voyager et je n’ai plus vraiment suivi ce qui se passait dans le monde, je me suis un peu coupée de la politique Française et Européenne et ça m’a fait du bien. Mais les récents événements m’ont rattrapée et je me suis replongée dedans. Les changements actuels sont trop importants et peuvent définir notre futur, je ne peux plus l’ignorer. J’ai vécu les élections présidentielles en Argentine et le changement de Président et c’était passionnant. J’ai discuté avec des Argentins très différents avec des opinions très différentes et j’ai vécu les changements au jour le jour avec eux. Au Japon, je n’ai pu en parlé qu’avec une personne, mais les Japonais ne parlent pas de politique et ne s’y intéressent pas vraiment. J’ai parlé avec des Israéliens de la situation en Palestine, j’ai parlé des Aborigènes en Australie et j’en passe. C’est aussi le quotidien de mon voyage.

Je considère également que mon choix de mode de vie est un choix politique d’une certaine manière. J’ai beau continué à vouloir participer à la société, à payer mes impôts, à voter, etc., j’ai décidé de sortir de ce modèle du travail que l’on nous impose depuis notre enfance et du modèle de consumérisme qui va avec. Je considère que voyager seule est aussi en partie un acte féministe. Combien de fois m’a-t-on posé des questions à ce sujet en voyage, combien de fois m’a t-on demandé quand j’allais me marier, combien de fois m’a t-on demandé si c’était bien raisonnable de voyager seule, combien de fois ai-je vu des regards choqués et d’incompréhension? Mais combien de fois aussi, j’ai convaincu quelqu’un que c’était possible et normal? Combien de femmes m’ont dit avoir été inspirées par mon histoire, que ce soit des voyageuses ou des locales? Des petites gouttes d’eau, qui ont leur importance sur une plus grande échelle.

Voyager est un acte politique

Au-delà de cela, au delà de considérer que par le voyage, je contribue à l’ouverture du monde et des peuples, le voyage me transforme et façonne mes opinions politiques. J’ai été confrontée à des systèmes politiques et des systèmes de pensée tellement différents, à des régimes totalitaires, à des manières de concevoir la vie et la société si différentes des miennes que j’apprends et je grandis. Je suis sans doute encore plus radicale depuis que je voyage, je me découvre écolo, alors que je ne l’étais pas du tout avant et je suis encore plus féministe. Le voyage façonne ma vision du monde et j’apprends au contact des peuples que je rencontre. J’espère qu’ils apprennent aussi un peu avec moi et qu’ensemble on arrivera à avancer.

Je suis toujours très pessimiste sur la société dans sa globalité, mais optimiste sur les individus et je continue à voir le bon dans ce monde et la possibilité d’un monde meilleur grâce à eux.

Alors oui, voyager est politique, voyager c’est faire le choix de l’ouverture au monde et aux autres, pour soi et pour ceux que l’on rencontre sur la route. Voyage et politique sont indissociables, alors prenez le temps d’apprendre à connaître un pays, son histoire, sa situation économique et politique, sans jugement, mais avec un esprit critique. Aujourd’hui, c’est plus important que jamais.

Voyager est un acte politique

Alors non, je ne boycotterai pas les Etats-Unis, mais je crois qu’il est enfin temps que j’aille au Moyen-Orient et en Afrique, pour montrer la réalité des choses, loin des médias à sensations et des clichés. Voyagez, informez-vous, apprenez, respectez l’autre et ouvrez-vous au monde. Vous serez peut-être surpris de ce qu’il en ressortira. Pour ma part, je continuerai d’apprendre, de discuter, d’argumenter et de parler de politique à qui le voudra bien. Qui sait quelles nouvelles idées pourraient naître?

Voyager est un acte politique

PS: Je mûris cet article sur la thématique de voyage et politique depuis plusieurs mois déjà, mais je m’excuse si ce texte est un peu en vrac, comme mes pensées. J’espère que le message sera clair et je serai ravie de discuter de tout cela avec vous ici, ou autour d’un bon repas 🙂


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