Interrompre un tour du monde et repartir…

Interrompre un tour du monde et repartir

La bande-son de ma vie est un peu chaotique ces temps-ci. Parfois, résonne au fond de ma tête un violent son de hard-rock. Parfois, c’est une mélodie douce et triste, en accord avec mon humeur du moment: l’incompréhension, la colère ou la tristesse.

Je vous parle de temps en temps de ma vie personnelle par ici, mais c’est un sujet un peu plus délicat que j’aborde avec vous aujourd’hui. Après réflexion, je ne peux que partager avec vous ces moments difficiles, les évènements de ce mois-ci définiront la suite du voyage et la suite de ma vie. Je suis en route depuis la France, vers le Chili, où je passerai quelques jours avant de m’envoler pour la Nouvelle-Zélande.

Il y a presque deux mois, après trois mois en Amérique du Sud et cinq mois de voyage, j’ai interrompu mon tour du monde. Nous étions le 10 février, le jour de mon anniversaire et je venais de passer une très belle journée au Paraguay avec mes nouveaux amis japonais. Nous venions de contempler un magnifique coucher de soleil, qui, paradoxalement ou prémonitoirement peut-être, m’avait rendu un peu triste et nous nous apprêtions à faire un barbecue géant pour fêter mon anniversaire. Avant le repas, je vérifiais mes e-mails et l’un d’entre eux me fit tomber le cœur; si une telle chose est possible… Mon père me demandait de l’appeler en urgence. Ma maman, malade, était mourante et il fallait que je rentre au plus vite.

Coucher de soleil au ParaguayJe vous épargnerais les détails pratiques compliqués pour partir en urgence du milieu de nulle part au Paraguay. Les gens qui m’entouraient ont été adorables et m’ont beaucoup aidé, je n’aurait pas pu demander mieux que leur compagnie et je ne les remercierai jamais assez. Yumeko qui fût là pour m’aider dans tous les détails pratiques, la famille Sonada de la pension japonaise qui s’est pliée en quatre pour que j’arrive à l’aéroport en temps et en heure, Masa et sa réconfortante présence silencieuse et tous les autres qui m’ont aidé par leurs petits gestes. “Il faut que tu continues à sourire, ta maman le voudrait” me répétaient-ils. “Tu sais, tu vas continuer ton voyage. Il le faut. Pour toi, pour elle.”, me disait Masa, en me confiant que toute sa famille était décédée lors de la catastrophe de Fukushima et qu’il continuait de voyager pour eux, comme un requiem. Touchée, je l’écoutais, j’acquiesçais, mais j’étais ailleurs et j’avais du mal à réaliser ce qui se passait. Pour moi, rien n’était réel, tout allait s’arranger, ce n’était qu’un rêve.

Un taxi, un passage de frontières à pied, 24 heures et trois vols plus tard, la réalité reprenait ses droits et j’apprenais qu’il était trop tard et que ma maman était décédée dans la nuit. Mon monde s’est brusquement effondré.

Elle était ma première lectrice, aux heures où, enfant, j’écrivais des poèmes et des nouvelles. Elle était aussi la plus grande fan du blog et suivait avidement mon voyage, en rêvant elle-même de partir. Elle n’a pas pu, elle n’en a pas eu le temps, partie bien trop jeune et laissant un grand vide derrière elle.

On me dit que je suis courageuse de reprendre la route et le tour du monde. Je ne le vois pas comme cela. Voyager était ma vie ces derniers-mois et je reprend le cours des choses, comme si je retournais au travail. Il faut continuer à avancer, continuer à vivre malgré tout. J’ai changé de vie, je suis partie en tour du monde pour ne pas avoir de regrets, car l’on a qu’une vie et que la vie est parfois bien courte. Tout cela ne peut que me renforcer dans cette voie. Elle voudrait que je continue le voyage, comme elle a voulu que je reste sur la route le plus longtemps possible. C’est un peu un hommage à elle, un hymne à la vie que de continuer. C’est aussi inévitable pour moi. Ma vie est sur les routes et je ne suis heureuse que comme cela pour l’instant. Cela va être difficile, surtout en tant que voyageuse en solo. La solitude, devoir laisser mes proches seuls en France, ma sœur accouchant dans quelques temps, ne vont pas faciliter les choses. Il y aura des moments durs, comme il y en a eu ce mois-ci en France. J’y pense souvent, j’y pense tout le temps. Les larmes me montent aux yeux dans les moments les plus anodins. Je souris aussi, en repensant à qui elle était, à ce qu’elle a fait et aux traces d’amour qu’elle a laissées derrière elle. Je suis morte de rire parfois, en repensant à ses bêtises et ses folies. Reprendre la route est un besoin vital. Cela va me guérir un peu, m’apaiser, me réanimer. C’est au volant d’une voiture que je me sens bien. C’est assise dans un train, le visage collé à la fenêtre. C’est en dansant sans musique et en me vidant la tête. C’est en regardant un magnifique coucher de soleil. C’est en constant mouvement que je survivrai à cette épreuve.

Ma famille avant mon premier départLorsque l’on part en tour du monde, en voyage au long cours, on sait qu’il y a un risque. On a toujours cette peur au fond de nous, de perdre quelqu’un. Je ne pensais pas que cela pouvait m’arriver. La vie en a décidé autrement. Il faut continuer à vivre et il faut sourire, comme le disaient si bien mes amis japonais. Pour moi, pour elle, pour mes proches, pour mon père, pour ma grand-mère, pour mes tantes et mes oncles, pour ma sœur, pour mon beau-frère, pour le bébé à venir, pour ses amis, pour mes cousins et pour tous les autres. Pour la vie.

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