Faire du camping en Antarctique
Préparatifs pour aller camper en Antarctique
Lors de ce voyage en Antarctique, s’il y a bien une chose à laquelle j’avais à la fois hâte et peur de participer, c’était l’activité de camping. Par une chance incroyable, j’avais pu m’inscrire à cette activité de camping en Antarctique. Lorsque Daniella m’en avait parlée, j’étais un peu sceptique et je ne voyais pas trop le but de dépenser 200$ de plus. Et puis, j’ai été lire des témoignages sur des blogs de voyage et je n’ai pas hésité. L’expérience avait l’air extraordinaire. Attention cependant, il est très rare de pouvoir participer à ces activités en achetant une croisière en Antarctique à la dernière minute.
Nous avions donc eu une réunion la veille pour nous expliquer en quoi consisterait cette excursion de camping, les différentes mesures de sécurité, etc. Le jour-même, l’on nous avait également attribué notre équipement de camping. Il faut savoir qu’il y a deux manières différentes de camper sur le continent Antarctique et qu’il n’y a pas assez de bivy (l’une des options) pour tout le monde. Premier arrivé, premier servi. Voulant absolument un bivy (je vous en dirai plus un peu plus loin), moi et quelques autres fous firent la queue devant le salon principal une demie-heure à l’avance pour être sûrs d’avoir ce que nous souhaitions. J’ai alors eu des flashbacks de queue pour des concerts ou autres événements…
Ce soir-là donc, en rentrant de notre excursion de la journée, nous étions un peu inquiets. Le temps avait tourné, il neigeait et l’équipe était assez peu optimiste sur la possibilité de pouvoir camper. Shane nous annonça même qu’il y avait 80% de chances que nous ne pourrions pas y aller. Résignés, nous devions tout de même nous préparer au cas-où. Le repas était une demie-heure plus tôt pour les 80 campeurs. A table, les spéculations allaient bon train, entre ceux qui étaient finalement heureux de repousser l’expérience, parce qu’ils étaient fatigués ou qu’ils préféraient le faire le soir de Noël et ceux qui étaient très déçus. Il y avait aussi les bougons qui se plaignaient de ne pas pouvoir boire, au cas où nous devrions passer la nuit sur le continent. Et soudain, sans prévenir, les conditions climatiques changèrent. La soirée de camping était à nouveau à l’ordre du jour et nous avions instruction de nous préparer.
Ni une, ni deux, je retourne à ma chambre pour enfiler ce qui s’avérera être 10 couches de vêtements et la totalité de mes possessions. C’est en mode bibendum, m’accrochant avec anxiété à mon équipement de camping que je prenais le zodiac ce soir-là vers 21h. Mes amis à bord me saluèrent et me souhaitèrent bonne chance, me traitant de folle! On nous annonça que suite au briefing de la veille, trois personnes s’étaient désistées… Rassurant tout cela! Le voyage en zodiac fût de courte durée et notre conducteur repartit en nous traitant de fous. Il ne reviendrait nous chercher que le lendemain matin ou dans la nuit en cas d’urgences.
Camper sur la banquise: l’installation du campement
Nous découvrîmes donc notre territoire pour la nuit. Un petit bout de terrain plat et très enneigé, à l’abri d’une colline avec une vue splendide sur la baie gelée. Au loin, le navire brillait de milles feus, comme s’ils avaient décidé de faire la fête durant notre absence. La chaleur, le thé chaud, les lits confortables, la télévision, la salle de bain… rien de tout cela pour nous ce soir: il était désormais impossible de reculer. Et c’est tant mieux! Au top départ, chacun a le droit de s’approprier son espace et de s’installer. Il est possible de se creuser un petit trou dans la neige pour se rassurer, même si cela signifie qu’il faudra tout remettre en place le lendemain matin en partant pour ne laisser aucunes traces. Je choisis un coin proche de notre port de fortune, pour ne pas avoir à patauger dans la neige trop longtemps, parce que ce sera plus simple en cas d’évacuation et que la vue près de l’eau est somptueuse. J’essaie tout de même de ne pas penser aux phoques léopards qui rôdent et qui n’hésiteraient pas à me croquer si d’aventure je tombais à l’eau! Heureusement que je ne suis pas somnambule!
Le campement se met peu à peu en place et je suis ravie de ne pas avoir choisi l’option tente, car cela semble être assez galère. Il y a donc l’option tente deux places pour les moins téméraires. Il faut savoir que la tente étant plus grande, elle sera plus difficile à réchauffer. Il faut aussi la monter et la démonter. L’avantage est de se sentir protégé et de pouvoir mettre ses possessions à l’intérieur. L’option que j’ai choisi est le bivy. Il s’agit tout simplement d’un sur-sac de couchage étanche qui permet de se protéger de l’humidité. Il s’agit donc de dormir à la belle étoile (même s’il n’y a pas d’étoiles en Antarctique en été), pour mieux profiter de l’expérience et de la vue. Il faut également savoir qu’un sac de couchage est plus facile à réchauffer qu’une tente.
Installer mon campement n’est donc pas très difficile. Après avoir choisi mon emplacement, j’installe mon matelas de camping (je réussirai à en obtenir un de plus pour une meilleure isolation plus tard), mon sac de couchage polaire à l’intérieur du bivy et mon sac à dos en guise d’oreiller. Une fois qu’il sera temps de se coucher, je plierai mon manteau d’expédition et le mettrais sous mon buste, et les bottes et mon gilet de sauvetage sous les pieds, pour les garder au chaud et qu’ils ne gèlent pas dans la nuit.
Une fois que tout le monde est installé, nous avons un autre briefing de sécurité et surtout le briefing toilettes, où l’on nous explique comment aller aux toilettes en cas de nécessité absolue. Il faut savoir que l’Antarctique est un continent vierge et que nous devons repartir sans laisser de trace. Ce qui signifie que nous ne pouvons pas amener à boire ou à manger sur le continent et qu’il est également interdit d’uriner ou plus. Personnellement, je préfère ne pas utiliser ces toilettes de fortune, d’autres seront plus aventureux que moi…
La nuit de camping en Antarctique
A 23h, c’est le couvre-feu et le moment de silence pour que chacun profite de l’expérience. Pendant que des manchots nous observent avec curiosité au loin, chacun regagne sa couche. Je reçois donc un nouveau matelas et essaye de l’installer tant bien que mal en dessous du reste. Ce n’est pas facile, puisque j’ai déjà enlevé mes bottes et que la buée a envahi mes lunettes. Ne voyant rien, j’enlève mes lunettes, mais n’y voyant toujours rien (du fait de l’absence de lunettes cette fois-ci), je mets le genou sur les dites-lunettes et les cassent. Oups! Camper en Antarctique sans y voir grand chose, cela va être sympa!
Je réussis enfin à rentrer dans mon sac de couchage et à m’installer. Mes 10 épaisseurs, mes deux paires de gants, mon bonnet, mes deux foulards, l’appareil-photo bien rangé dans la poche interne de ma veste pour ne pas tuer la batterie… Je suis enfin prête. Bizarrement, je n’ai pas vraiment froid. Je profite de la vue (même si je vois flou) quelques temps avant de m’allonger. La couche est pour le moins inconfortable, à cause de la neige et de ce que j’ai mis entre moi et le matelas. Je referme le sac de couchage et le bivy pour laisser seulement une petite ouverture (cela permet d’éviter la condensation, la claustrophobie et de voir la couleur du ciel changer). Le silence se fait. Le silence de l’Antarctique. Au loin, les manchots pépient. Parfois, il y a des ploc ploc dans l’eau: un bout de glace qui tombe ou peut-être un phoque qui rôde… Et puis, un bruit sourd, profond, énorme. Comme un coup de tonnerre, une explosion ou même la fin du monde. Le bruit n’en finit pas et est assez effrayant. Il s’agit en fait d’une avalanche au loin, très loin qui retentit dans toute la baie.
C’est ça, l’Antarctique. Le vide, le silence, le froid, les animaux, les échos, l’immensité. C’est un sentiment incroyable de se sentir ainsi, seule au monde dans cette vaste immensité. Un sentiment à la Into the wild. Le bon moment pour réfléchir, apprécier le monde qui nous entoure et la chance que l’on a. C’est sur ces bonnes pensées que je m’endormis épuisée. Je fus d’abord réveillée par des ronflements, des chuchotements et des bruits de pas. J’avais l’impression que tout cela se passait juste à côté de moi, mais c’était probablement loin de moi. Vers trois heures du matin, je me réveillais à nouveau pour voir le lever du soleil.
Le temps n’était pas merveilleux et nous n’assisterons pas à un magnifique lever de soleil. Pourtant, la lumière jaune rend tout cela très beau. La neige est tombée et a recouvert les sacs de couchage. Tout le monde dort et l’ambiance est feutrée. Assise, je profite quelques instants de cette solitude et de ce moment que je suis seule à vivre. Un pur bonheur, un moment intense et unique.
Je me recouche à cause du froid et me rendors. A plus de 6h du matin, je suis réveillée par le bruit de ceux qui plient le campement. Lorsque j’ouvre mon sac de couchage et que je regarde autour de moi, quasiment tout le monde est parti. On peut dire que j’ai bien dormi. Mais surtout ce que je vois en premier ce matin-là, ce sont trois curieux manchots, juste devant moi qui sont venus voir ce qui se passait. C’est le matin du 24 décembre et les manchots sont mon premier cadeau de Noël de ce voyage en Antarctique.
Bien obligée de faire comme tout le monde, je m’extirpe de mon sac de couchage. Il fait un froid de canard (ou de manchot!) et il est dur de tout remballer avec les doigts gelés. Je jette un dernier regard sur le campement et j’embarque à bord du zodiac qui me ramènera au confort et à la chaleur du bateau. Au programme une douche chaude et un bon petit-déjeuner avec les amis pour leur raconter notre aventure.
Cette nuit de camping en Antarctique fût extraordinaire et un des meilleurs moments de ce voyage. Je le referai sans hésiter, même si c’est un peu cher et que j’en suis ressortie avec un grand mal de dos et des lunettes cassées. Cela donne un avant-goût de ce que peuvent vivre les scientifiques au quotidien en Antarctique et ce que vivaient les explorateurs, tout en étant en toute sécurité. Une occasion de réfléchir et de vivre la nature entièrement.
J’espère d’ailleurs avoir l’occasion de dormir à la belle étoile dans d’autres endroits.
D’ailleurs, vous n’auriez pas des lieux à me conseiller pour dormir à la belle étoile?
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